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 Repenti [Solo] [scènes violentes]

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Alasker Crudelis
Alasker Crudelis
Le nettoyeur
Sam 7 Sep - 5:43

précédemment:


Avec toutes ces années passées à ses côtés, Alasker avait finit par partager certains des points de vues de Carl. Le mélange de réalisme et de fatalisme du maître des Sanglots était ainsi : Facilement compréhensible et...Hautement transmissible. Comme une maladie. Ou une religion. Au départ, le premier jour, la première semaine, le jeune naïf comme le vétéran de guerre ne tombait que rarement d'accord avec lui. On trouvait ses opinions trop tranchés, élitistes, parfois carrément cruels. Mais au bout de quelques temps...l'esprit même semblait se déformer sous les assauts répétés du père des Dévoreurs. Ainsi, au début, Alasker et Carl n'avaient été que trop souvent en désaccord.
Cependant, lors de leurs toutes premières conversations, ils s'étaient accordés très vite sur un fait :
Le désert est détestable.
Des dunes de sables, à perte de vue. Des serpents, des scorpions, mordant ou piquant les bottes, à la recherche d'une faille pour inoculer un venin parfois mortel dans les veines du malchanceux et de l'imprudent. Pas de végétation. Pas d'abri, ni d'ombre pour échapper au regard d'une sentinelle ou d'un sniper. Des dizaines, des centaines de petites factions de pirates, de mercenaires opportunistes, toutes prêtes à abattre et piller les quelques inconscients assez stupide pour croire que l'homme n'était encore qu'un simple passager, et pas un résident, ici-bas, dans cet enfer tourbillonnant.
Le pire de tout restait le soleil, bien entendu.
Même après avoir été amélioré génétiquement pour résister à la morsure de l'acide ou celle des flammes, Alasker avait mit un certain temps à supporter l'attaque constante de l'astre solaire sur son visage et ses yeux. Même maintenant, il ressentait encore un inconfort tout particulier lorsqu'une bourrasque de vent brûlant venait lui fouetter le visage en plantant cruellement de petits grains de sables dans ses yeux noirs, aux triples paupières.
"-T'es sûr que c'est pas au prochain croisement? J'ai cru voir une pancarte..." Marmonna entre ses dents ce foutu pilote, assit au bord de la rampe de débarquement arrière du vaisseau. Alasker parvint à cracher un ricanement peu convainquant en lorgnant les environs :
De croisement, il n'y avait point. En fait, il n'y avait rien. Rien que du sable. Et les silhouettes de quelques pythons rocheux, au loin. Pas de signes de vies visibles. Juste une mer sableuse, bouillante et interminable.
"-On attend la nuit?" Cracha Sonia, à ses côtés. L'exécutrice du lieutenant ne semblait nullement affectée par la météo et ce détail, plus que tout autre, attestait des modifications de son corps. Alasker lui-même suait comme un boeuf dans son armure et, pourtant, la chienne de Tarvitz ne manifestait pas le moindre dérangement physique. Son crâne chauve, pourtant assez blanc pour être translucide, ne luisait pas. Sa respiration, ses déplacements, ses yeux. Rien n'avait changé depuis le début de leurs voyages.  C'était assez impressionnant à voir.
Mais loin d'être suffisant pour la suite.
"-Y'a pas de "on". J'y vais tout seul."
Le pilote qui, lui, ressentait tout les méfaits de la chaleur intense, essuya son front luisant en s'emmêlant les doigts dans une mèche de cheveux collée à celui-ci tout en ricanant :
"-Ton nouveau petit copain est très indépendant, Sony'."
L'intéressée fusilla du regard les deux hommes avant de répondre :
"-Pas deux fois, tu m'as déjà fais le coup avec la vieille. Cette fois je viens, ce n'est pas discutable."
Elle releva la manche gauche de son pantalon de treillis assez haut pour qu'Alasker puisse distinguer la prothèse d'acier blindé lui servant de jambe, puis installa un fourreau magnétique contre son "mollet", dans lequel elle glissa un couteau de combat long comme un avant-bras.
Vickers se remit aussitôt à ricaner en dégainant son propre couteau, d'un modèle manifestement semblable.
"-Si tu veux pas finir avec une lame pareille plantée dans la tronche, j'te conseille de laisser la dame venir. Quand elle commence à montrer ses jouets..."
Alasker leva les yeux au ciel, à la fois agacé et amusé par cette pitoyable tentative d'intimidation :
"-Il est mignon, ton cannif'. C'est le même que le sien?"
L'avorton haussa les épaules :
"-Bah, c'est l'cut règlementaire, quoi.
-File-le moi."
Vickers chercha du regard sa comparse féminine. Sonia soupira et hocha la tête, lui donnant ainsi son accord. Alasker récupéra le couteau puis, sans hésiter, le planta en plein milieu de son propre front. La pointe de l'arme pénétra brutalement la chair du géant avant de s'écraser contre sa boite crânienne. Le bruit de l'impact fit grincer des dents les deux témoins de la scène. Et puis, la lame, incapable de briser la cage d'os protégeant le cerveau du monstre, se brisa en deux.
Alasker jeta derrière-lui les restes tordus de la poignée tout en retirant nonchalamment, de sa main libre, la moitié de lame encore plantée dans son front. Vickers l'observait faire en affichant une grimace particulièrement affreuse.
"-T'es obligé d'être parfaitement dégueulasse quand tu veux prouver un truc?
-Y'a rien de mieux que le dégoût et la peur pour convaincre l'être humain." Rétorqua le géant de fer, citant ainsi, une énième fois, un homme qu'il respectait autant qu'il le détestait. Un homme au regard venimeux et au sourire éternellement sardonique.
"-Et c'est censé me convaincre que?...
Alasker retint un juron puis cracha, agacé :
"-Que je peux me "prendre une lame pareille dans la tronche" sans en avoir quoique ce soit à carrer. Ce qui rend ta précédente menace caduc, bougre d'imbécile.
-Eeeeet donc?
-C'est pas ton cas, ni celui de Sonia. Et celui qu'on part chasser me fait passer pour un saint. Les petites améliorations de la dame ne vaudront strictement rien une fois en face de Tarcus.
-A voir." Répondit simplement Sonia.
Le géant de fer jeta un coup d’œil en direction de l'agente du Talon. Canon à plasma en main, elle commençait déjà à s'éloigner d'eux, sans même risquer un coup d'oeil dans leurs directions. Lorsque le rire nasillard du pilote se fit entendre une nouvelle fois, Alasker dû réprimer le désir, très séduisant, de vider un chargeur de l'humaniste dans le visage de l'imbécile.
"-Eeeeet elle se casse. Tu devrais la rejoindre. 'faudrait pas qu'elle se fasse descendre. Tu sais c'que dirait le lieutenant sinon.
-Imbéciles." Cracha simplement le géant de fer en tournant le dos à Vickers pour rejoindre sa collègue-surveillante d'un pas pesant.
Vickers les observa s'éloigner en pouffant pendant quelques instants. Puis il écrasa sa cigarette contre la carlingue de l'oiseau de métal avant de retourner à l'intérieur et profiter de la climatisation intégrée.

Ils dénichèrent le premier feu après deux kilomètres de marche en ligne droite plein Sud. Ce n'était guère plus qu'un tas de cendre éteint depuis trop longtemps et à moitié recouvert de sable. Le deuxième, très semblable au premier, ne se trouvait qu'à une centaine de pas du premier. A partir du troisième, ils en trouvèrent un tout les cinquante mètres, environ. "Suivez les cendres, suivez la poussière des morts" était-il marqué, gravé, inscrit, en une dizaine de langues, dans le sable, ou sur les planches de bois ayant survécut aux foyers. Alors ils suivaient. Passaient d'un feu à un autre, sans s'accorder la moindre pause, sous ce soleil de plomb.
"-Il y avait des os dans celui-ci." Avait observé Sonia, accroupie au milieu d'un énième tas de cendre."Des os humains. De petites tailles."
Alasker n'avait rien répondu. Nulle surprise dans cette découverte. Si Le Boucher était effectivement devenu le bras droit d'une sainte dans le désert, il fallait s'attendre à beaucoup plus sordide que de simples corps brûlés, vifs ou non.
Adultes ou non.
Le premier autochtone qu'ils rencontrèrent les salua en braquant un canon dans leurs directions. Cela eût lieu à la nuit tombée, juste après qu'Alasker ait fouillé dans un énième tas de cendre via quelques coups de bottes.
"-Profanateurs !" Avait hurlé une voix grave, sur la droite du géant.
Interloqué, le fouille-cendre avait dégainé l'Humaniste tout en faisant volte-face en direction de l'auteur de la singulière exclamation. C'était un homme au visage masqué par un voile blanc ne laissant entrevoir que ses yeux marrons, exorbités et injectés de sang. A l'inverse de sa face, ses bras et son torse étaient nus, sans aucun tissu ni protection. Sa peau noire semblait calcinée sur le flanc gauche...Et sa maigreur avait quelque chose d'alarmant tant elle semblait prononcée.
Le plus étrange restait que l'original était enfoncé jusqu'aux genoux dans le sable. Et qu'il pointait un vieux modèle de fusil d'assaut sur le duo.
"-Tu sais, fiston...En général, on se planque sous le sable quand il fait nuit depuis quelques heures, ça évite de cramer durant l'attente." Avait simplement conseillé Alasker, en pointant du menton les traces de brûlures, récentes, sur la peau noire de leur nouvel ami.
Manifestement dépourvu du moindre humour, ce dernier s'était contenté d'agiter son flingue devant lui, non sans hurler d'avantage :
"-Le profanateur doit poser son arme et se rendre ! En silence !"
Alasker, qui commençait à trouver cette scène franchement ridicule, avait fait un pas vers l'excité :
"-Tu te crois intimidant avec ta pétoire?"
Une rafale de trois balles s'était écrasé à ses pieds, en l'aspergeant un peu plus de sable chaud.
Sentant sa patience s'épuiser rapidement, le géant avait soupiré d'agacement.
"-Raye la peinture de mon armure avec cette daube et je te jure que je t'arrache la tête à mains nues. T'es prévenu."
La chienne du lieutenant, parfaitement immobile, était allée jusqu'à risquer quelques mots se voulant conciliant :
"-Nous cherchons simplement la sainte. Nous ne venons pas en ennemis."
Ce qui avait provoqué l'hilarité du géant à ses cotés.
"-"Nous venons en paix", ça marche pas quand t'as un pote qui ressemble à un putain de char d'assaut, tu sais?
-Nous cherchons tous la sainte, ma soeur, mais je ne peux pas te mener jusqu'à elle tant que le profanateur n'a pas..."
Les dents dudit profanateur s'étaient mises à grincer :
"-Il m'emmerde à m'appeler comme ça. Je crois que je vais le buter."
L'air peu affecté, Sonia avait simplement haussée les épaules :
"-Il a au moins l'air de savoir où elle est.
-Bah moi aussi.
-On marche en ligne droite depuis cinq heures et demi !
-C'est juste un peu loin. Tu voulais qu'on s'pose au milieu d'un village d'illuminés avec l'oiseau? C'est de loin la meilleure idée pour se prendre une roquet...
-Dernier avertissement, profanateur ! Pose ton arme et agenouilles-toi !"
Sonia avait soupiré et porté la main à son front en entendant le grondement d'Alasker :
"-Dernier avertissement, effectivement."

Alasker ricana en se souvenant de la suite.




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Alasker Crudelis
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Sam 7 Sep - 5:55

Au moins, l'imbécile avait eût le mérite de ne pas hurler ou supplier lorsque le géant avait franchit les quelques mètres les séparant d'un unique bond pour lui décrocher, d'une rapide torsion de poignet, la tête des épaules.
Sous le regard de Sonia, l'ancien mercenaire s'était débarrassé du crâne en le jetant derrière-lui, comme si il s'était agit d'une simple canette vide.
"-Était-ce vraiment nécessaire?" Avait demandé, bien inutilement, la tueuse.
"-Je déteste les religieux."
Les yeux augmentés de la chauve s'étaient posés sur le sable rougit par le sang, puis elle avait reprit :
"-On marche encore, alors?
-Tout droit, ça devrait plus tarder maintenant."

Concernant ce dernier détail, tout était affaire de perspective, bien entendu. Une heure après cette décapitation impromptue, le duo continuait encore de marcher "tout droit" et, même si le voyage devenait plus agréable pour Alasker, maintenant que la lune avait remplacé le soleil et qu'il avait pu faire couler le premier sang, l'absence apparente de progression commençait à les lasser.
"-T'aurais au moins pu lui poser quelques questions avant de le descendre." Reprocha Sonia lors de la descente d'une énième butte.
Alasker s'immobilisa en l'ignorant totalement.
"-Et en plus, t'as aucune conversation." Grinça-t-elle entre ses dents.
Les yeux du géant se plissèrent.
"-J'ai des hallu' ou y'a un truc en haut, là?"
Il pointa un doigt ganté vers l'Est et Sonia s'empressa de balayer la zone du regard. En effet, au loin, tout en haut d'une dune, se dessinait une forme haute, peu naturelle. Elle confirma d'un hochement de tête puis entreprit d'augmenter la portée de ses yeux augmétiques. La mise au point prit un peu moins de cinq secondes. Au terme de ces dernières, la chauve pu décrire à son accompagnateur ce qui semblait être un mirador improvisé, fait de brics et de brocs, manifestement vide de toute sentinelle.
"-Ça a l'air d'être la pause café." Observa-t-elle en clignant des yeux pour revenir à sa vision normale.
Alasker grimaça, son propre regard posé sur un tas de cendres, à quelques pas derrière-eux.
"-Plutôt la pause bûcher, vue l'ambiance générale."
Faute d'autres idées, ils décidèrent très simplement de rejoindre le mirador dans l'espoir d'y dénicher quelques informations sur la sainte.
Lorsque, à mi-chemin, une dizaine de corps s'extirpèrent du sable pour braquer autant de canons dans leurs directions, le duo estima qu'il avait vu juste.
"-Le premier qui me traite de profanateur va se retrouver avec la tête enfoncée dans le cul de son voisin."
Alasker ne s'était même pas fatigué à dégainer sa propre arme en déclarant cela. Avec la camelote qui leurs servaient de crache-plomb, il ne risquait pas grand chose. Même dépourvu de la moindre protection, leurs petites balles n'auraient pas réussi à percer son cuir.
"-Jetez vos armes. Vous êtes encerclés."
Sonia eût un petit rire à l'entente de la voix tremblante venant de les avertir.
Le géant se massa la nuque.
"-Estime-toi heureux que je ne les ai pas sorties, plutôt. Elles ont tendances à faire de très gros trous tu sais?
-Vous ne faites peur à personne." Risqua une autre voix.
Alasker fronça les sourcils et serra les poings. L'un des fusiliers recula d'un pas.
"-Je fais peur à tout le monde. Et surtout aux quatre, là, à ma gauche. En particulier celui qui n'arrive pas à détacher ses yeux des gouttelettes de sang sur mes gantelets. J'ai déjà arraché la tête d'un de vos copains y'a pas longtemps et le lance-pierre qui lui servait de fusil n'a strictement rien fait pour m'en empêcher, donc baissez d'un ton et soyez humble, ok?"
Court silence. Alasker se mit à sourire.
"-Maiiiis je vous l'accorde : Pour des culs-sableux paumés au milieu de nulle part, vous tremblez moins des genoux que la plupart face au prochain stade de l'évolution humaine. Auriez-vous déjà vu, par hasard, quelqu'un comme moi, récemment?"
Le simple fait d'avoir à poser cette question lui laissa un goût bizarre en bouche. "Quelqu'un comme moi". C'était possible. Ca existait.
"-Tu sais bien que oui, mon frère !" Répondit une voix grave, manifestement enjouée, sortant de la gorge d'une créature gigantesque, bien trop semblable à Alasker.
Le silence qui s'ensuivit sembla presque sacré, pour le Géant de fer. Savoir que d'autres comme lui existaient, respiraient, c'était une chose.
En voir l'indiscutable preuve en était une toute autre.

Tarcus allait tête nue. Son armure argentée, parfaitement entretenue, brillait en reflétant la lumière de la lune. Même de loin, alors qu'il descendait la dune pour rejoindre l'atypique attroupement, on pouvait facilement constater que le nouvel arrivant était plus grand et plus épais qu'Alasker. Au moins dix a vingt centimètres, selon ce dernier. Pourtant, des deux, le géant du Talon semblait bien plus...Fondamentalement dangereux, que son vis-à-vis illuminé. De longs et lisses cheveux blancs encadraient son visage souriant, triangulaire, bien taillé et aux traits sévères mais fins, indiscutablement beau malgré ses proportions inhumaines. Ses mains gantées, grandes ouvertes, n'étaient alourdies d'aucun dispositif tranchant, brûlant, ou contondant. Il avait l'air d'un antique et noble chevalier venant humblement pourparler avec un roi barbare ayant cruellement pillé ses terres.
Tarcus "Le Boucher", noble, humble et bien peigné, faisait passer Alasker de La Griffe pour un barbare instable, repoussant et dangereux.
Ca avait quelque chose d'assez gratifiant.
"-Salut à toi, Boucher." Fit simplement l'ancien mercenaire, d'un ton neutre, en attrapant par le bras Sonia, qui avait déjà levé son arme en direction de son "frère".
Tarcus, tout en continuant de s'avancer, hocha la tête et échappa un petit rire :
"-Je n'ai jamais su si ce surnom était une sorte de titre honorifique ou une insulte."
Alasker s'accorda le droit de sourire à son tour.
"-C'était une insulte honorifique."
Autour d'eux, les fusiliers ensablés semblaient de plus en plus mal à l'aise. Leurs yeux passaient d'un géant à l'autre, réprimant difficilement une terreur primale, instinctive, que le géant du Talon sentait enfler de minutes en minutes via l'emballement de leurs signes vitaux. Ainsi, ils craignaient autant l'un que l'autre.
Intéressant.
"-Paix, fils des cendres."Déclara Tarcus à l'intention des ensablés."Je m'occupe personnellement de cet invité surprise.
-Il dit avoir tué l'un des nôtres." Risqua l'un d'eux.
"-Et il dit sans doute vrai, regardes-le. Mais ce ne serait pas le premier a avoir erré dans les ténèbres avant de trouver la vraie lumière."
Les armes se baissèrent de concert. Alasker réprima une grimace de mépris face à l'apparente soumission des imbéciles autour d'eux et haussa un sourcil lorsque Tarcus lui tendit sa main droite :
"-Accepterais-tu que je te serve de guide?"
Les deux géants mirent définitivement fin aux tensions via une rapide poignée de main.
"-Tant qu'on peut parler...Et que tes copains n'emmènent pas Sonia dans une cave pour "l'initier" aux pratiques de ta petite secte.
-Ton humour est toujours d'aussi mauvais goût, Iratus." S'amusa l'autre en remontant déjà la dune d'où il venait.
Alasker lui laissa quelques mètres d'avance puis l'imita en haussant les épaules, suivit par Sonia, qui lui murmura :
"-C'est LUI, qui était censé te faire passer pour un Saint?"
Les lèvres du tueur se retroussèrent un peu plus dans un affreux sourire.
"-Ne te fie pas trop aux apparences...Mais il a manifestement changé.
-Positivement, à première vue."
L'ancien mercenaire fixa sa collègue avec amusement :
"-Le preux chevalier Tarcus t'aurais séduite?"
La concernée pouffa.
"-Séduite, c'est un bien grand mot. Mais même toi tu dois reconnaître qu'il est impressionnant, en plus d'être agréable à regarder."
Alasker pencha la tête sur le coté en fixant son semblable, quelques mètres plus loin, occupé à apaiser  à voix basse les doutes d'un fusilier ensablé.
"-Comme je dis, ne te fie pas trop aux apparences. Tarcus a toujours eu une belle gueule. Mais ce qu'il était capable de faire...
-Tout le monde change." Coupa Sonia. "Il n'a pas l'air mauvais. Plus l'air, en tout cas."
Le Nettoyeur du Talon cligna des yeux et observa l'un des fusiliers s'agenouiller aux pieds du Boucher pour lui adresser une prière de remerciement. Tarcus posa l'une de ses énormes mains sur son épaule droite et l'homme se releva. Il y avait des larmes, dans ses yeux. Des larmes de joies.
"-Peut-être qu'il n'y a que toi qui est resté un assassin sanguinaire, au final." Ironisa-t-elle, moqueuse.
Alasker hocha la tête.
"-Peut-être." Répéta-t-il simplement.




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Alasker Crudelis
Alasker Crudelis
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Sam 7 Sep - 6:18

"-J'imagine que tu ne t'attendais pas à ça." Avait dit Tarcus, dès leur arrivée dans le village.
Alasker, tout en balayant du regard les environs, faits de bicoques branlantes et de tentes aux toiles couvertes de crasses et de sables, avait gardé le silence, peu sûr de connaître la réponse...Ou d'avoir bien compris la question.
Qu'était-ce donc que ce "ça"? Concernait-il l'apparence de ce village puant la pisse et la sueur, pitoyable au possible? Ou était-ce plutôt dirigé sur ses autochtones faméliques, mélange d'hommes de foi et de mendiants? A moins que Tarcus ait voulu parler de lui-même, de son changement si...Brutal, qui le rendait méconnaissable, aussi bien psychologiquement que physiquement pour son frère de douleur.
Dans les deux premiers cas, Alasker aurait tout de suite démenti. Oh que si, il s'était attendu à "ça". Des rues crasseuses, peuplées de crève-la-faim au regard fou, si caractéristique de celles et ceux ayant été assez stupides, crédules, pour se perdre corps et âmes dans la religion et toutes les naïves illusions que cette dernière colportait avec elle. Oui, il s'était attendu à parcourir ces chemins de traverses passant pour des rues. A slalomer entre des toilettes sèches et des corps anorexiques, rongés par la maladie, allongés ici ou là, faute de meilleur endroit pour agoniser. Le géant s'était aussi attendu à croiser les regards suppliants de mères, de grands-mères, de sœurs, berçant de leurs bras osseux de ridicules petits cadavres en devenir, trop jeunes et trop affamés pour comprendre qu'ils ne vivaient encore que parce que la mort, comme le reste du monde, les oubliait.
Et il s'était surtout attendu...Et préparé...Aux tapis de corps prosternés. Aux carcasses décharnées psalmodiant fébrilement des textes en latins, en arabes et en hébreux. Aux piles d'antiques AK-47, AK-74, RPK, AK-12 et autres craches-plombs obsolètes depuis des décennies, trainant ici et là, montés ou démontés, chargés ou déchargés. Parfois repeint, customisé maladroitement. Avec des textes sacrés gravés sur la crosse. Ou une petite croix pendant au bout du canon.
Oui. Bien sûr. Alasker s'était sacrément attendu à découvrir ce genre d'énorme tas de détritus passant pour un village de pèlerins. Que pouvait-on espérer d'autres, aux vues des circonstances?

Sonia chassa un duo de gosses aux yeux exorbités cherchant à toucher son fusil à plasma.
"-C'est la cour des miracles par ici."
Devant elle, Alasker grogna :
"-Te laisse pas avoir par leurs airs de pauvres petits affamés. Les piles d'AK ne sont certainement pas là pour faire jolies.
-Même si les AK n'étaient pas là, j'me laisserais pas avoir. Trop pitoyables pour êtres honnêtes." Ironisa la chauve en posant son fusil derrière sa nuque, le long de ses deux larges épaules.
La voix de Tarcus, pourtant à plusieurs mètres devant eux, se fit soudainement entendre :
"-Cela vous surprendra peut-être, mais ces armes ne sont là que pour assurer notre propre sécurité. Nulle criminalité n'est tolérée, ici-bas."
Alasker pouffa, croyant à une blague.
"-Elle n'est jamais tolérée nulle part. Officiellement."
Mais son semblable ne riait pas, lui.
"-Officieusement non plus, crois-moi. Personne ici ne souhaite décevoir Persefonne."

Le géant de fer fronça les sourcils et repensa à La Question. Au "ça". Et si Tarcus avait voulu faire référence à son changement, avec ce "ça"?
Les yeux noirs du tueur se posèrent sur le dos de l'étrange chevalier d'argent pour étudier sa démarche ne trahissant pas la moindre agressivité. Pas le moindre égocentrisme. Alors même qu'ils marchaient au milieu des plus pitoyables représentants d'une espèce inférieure : L'humanité.
Dans ce cas, hé bien...Effectivement. Al' ne s'était clairement pas attendu à "ça". A cette étrange reconversion du Boucher en Chevalier. Lorsqu'Abi' lui avait parlé de cette histoire, le géant de fer s'en était amusé, intérieurement. "Quel est le but derrière un tel mensonge?" avait-il pensé, persuadé que la réalité n'était pas, ne pouvait pas, être ce qu'on disait. Mais, maintenant que Tarcus marchait devant lui, souriant aux pauvres, aux affamés et aux illuminés sans caresser une lame ou une gâchette...
Alasker doutait. Ses pitreries de gentil gardien sonnaient trop...Vraies. Pourquoi se donner autant de mal pour si peu? Ces abrutis ne possédaient clairement rien d'importants. Leurs femmes étaient trop maigres ou malades pour servir de butin. Et il y avait une flopée de meilleurs moyens d'acquérir sa petite armée personnelle. Alors quoi? Le tortionnaire le plus cruel, le plus inventif et le plus instable de son ancienne section s'était-il véritablement transformé en un bon samaritain d'une demi-tonne ?
Impossible.

"-C'est toi qui a formé les soldats sous le sable, dehors? C'était plutôt un bon piège."
Tarcus répondit sans cacher son amusement :
"-Ils étaient déjà "formés" en arrivant ici.
-Hm?
-Ce sont des repentis, comme beaucoup. Un ancien groupe de pillards qui a décidé de se rendre utile pour une bonne cause."
Alasker esquissa une grimace de dégoût. Après une courte pause, l'Ancien Boucher reprit :
"-Celui que tu as tué.
-Par décapitation." Précisa le géant de fer, tout sourire, espérant ainsi déclencher une réaction quelconque.
Sans succès.
"-Ils l'avaient bannis pour mauvaise conduite. Il avait rompu son serment. Pour expier sa faute, il errait de nuit, dans le désert, depuis six mois. Et traquait ceux qui le méritaient. Seul."
Le tueur du Talon entendit sa collègue chauve murmurer derrière-lui :
"-Bravo, t'as tué Batman."
Le rire d'Alasker ne sembla pas troubler leur guide, ce qui accentua la confusion de l'ancien mercenaire.
"-Il était pas très solide pour un vengeur masqué.
-Aucun humain ne l'est vraiment."
Ah, enfin une ouverture pour une vraie conversation ! Le Géant de Fer enjamba un corps tremblotant recroquevillé au milieu du chemin puis enchaina :
"-Tu as l'air d'avoir bien encaissé les changements."
La réflexion traversa Tarcus sans éveiller la moindre émotion en lui, à première vue. Il se contenta de continuer de marcher, silencieusement, devant le duo d'agents du Talon. Alasker ne prit pas la peine d'insister. Peut-être était-ce trop tôt pour parler de ce genre de choses? Ou le mauvais lieu? Ce n'était pas très chevaleresque comme sujet de conversations après tout. La mutation dans la douleur et la peur, ça manquait de dragons à occire...Ou de Sainte à protéger.
"-Tu nous emmènes voir ta bigote de compét' ?
-Oui."
Le trio n'échangea pas la moindre autre parole lors des dix prochaines minutes. En silence, les géants traversèrent le champ de tentes et de corps gémissants. Le premier gratifiant d'un sourire plein d'affection celles et ceux qui se trainaient vers eux pour se prosterner et prier tandis que le deuxième chassait ces mêmes pauvres ères en leur adressant un rictus et quelques gestes définitivement moins bienveillants. L'étrange traversée sembla durer éternellement, autant du point de vue d'Alasker que celui de Sonia. Et puis, au moment où ils commençaient à se résigner, Tarcus s'arrêta.
"-Plus loin se trouve La Sainte.
-Bah j'm'en cogne." Grinça l'autre géant, d'un ton provocateur.
Sonia pouffa.
"-On doit se faire baptiser avant de la voir, c'est ça?"
Tarcus se tourna vers eux en affichant une moue dédaigneuse. Son semblable du Talon tira une grande satisfaction de cette vision. Preuve que le preux chevalier pouvait encore ressentir quelques émotions négatives lors de certains moments.
"-Vous n'êtes pas encore des initiés. Alors vous paraîtrez devant elle un par un."
Les grosses épaules d'Alasker se haussèrent.
"-J'ai pas besoin de Sonia pour tuer une simple humaine, tu sais?"
Tarcus lui adressa un sourire. Un vrai sourire. Son ancien sourire. Le rictus d'un prédateur sûr de sa toute puissance.
Comme les vieilles habitudes pouvaient revenir vite, dans certaines circonstances.
"-Non. Mais tu aurais besoin de tout l'aide nécessaire pour tuer cette humaine-ci en ma présence."
Alasker se passa la langue sur les lèvres et fit un pas en direction de son "frère".
"-Tu me met au défi, fiston?"
Et de nouveau, le masque de bienveillance de Tarcus refit surface. Calmement, il présenta ses deux mains vides au tueur face à lui en déclarant :
"-Tu te méprends sur mes intentions. Je ne fais que prévenir. En tant que protecteur, je serais obligé d'agir si tu tentais quelque chose. Mais ne crois pas que ce serait par plaisir. La dernière chose que je désire est de me battre contre l'un de mes seuls frères encore en vie."
Alasker fronça les sourcils, peu convaincu. Mais des yeux de son alter-égo bienveillant semblait émaner une franchise déstabilisante qui sapait sa propre hostilité.
"-Finissons-en, alors." Gronda le géant de fer en dépassant Tarcus, au pas de course.

Elle était agenouillée, seule, devant un autel miteux fait de terre cuite et de bois bizarrement agencé. Une épaisse bure marron foncé dissimulait son corps et ses yeux sous son épais tissu. Ses mains bandées n'étaient pas liées l'une à l'autre dans l'antique geste si caractéristique de la prière mais...Alasker pouvait entendre qu'elle psalmodiait quelques paroles en latin, sans pour autant en comprendre la teneur. Prise dans sa mystique occupation, la Sainte demeurait immobile, tournant le dos aux deux géants l'observant, sans même détecter leurs présences.
"-Ma dame." Risqua Tarcus, après un court instant de flottement.
Les baragouinages latins cessèrent. Le géant du Talon réprima un ricanement, ne souhaitant pas vexer trop vite cette illuminée-ci en riant ouvertement de ses croyances.
"-C'est l'un de tes frères?" Demanda la Sainte, d'une voix trop claire, trop jeune, trop vive.
Son chevalier lui répondit d'un hochement de tête qu'elle ne pouvait toujours pas voir.
"-Il est le "réussi", Persefonne."
La concernée se releva lentement, sans pour autant se tourner vers eux.
"-Laisse-nous, alors."
Alasker, malgré le fait qu'il se soit placé devant son "frère" en arrivant, perçut très nettement le brusque hérissement de Tarcus, à l'entente de cet ordre. Et pour cela, le géant du Talon éprouva encore une fois joie coupable. Bien, messire le gardien pouvait encore ressentir la frustration et la crainte, au final.
"-Je ne pense pas que..." Commença ledit Sire.
"-Viens-tu pour me tuer, frère de Tarcus?"
Le géant concerné, surprit par la franchise de la question, marqua une pause de quelques secondes avant de répondre :
"-Nan m'dame, sinon y'aurait eu beaucoup plus d'explosions avant notre rencontre.
-C'est bien ce que je pensais. Tes craintes sont infondées, Tarcus. Tu peux disposer."
Court silence.
Alasker sentit du mouvement dans son dos...Et puis une main aussi énorme que la sienne vint se poser sur son épaulière.
"-Ne lui fais pas de mal." Siffla une voix chargée de promesses violentes. "Ou je t'en ferais. Bien plus."
Un grand sourire apparut sur les lèvres d'Alasker tandis qu'il faisait volte-face pour fixer le visage grimaçant de son vis-à-vis.
"-Ca, c'est une phrase qui ressemble plus à mon bon vieux boucher !"
Une tristesse, non, une douleur véritable passa dans les yeux clairs de Tarcus, l'espace d'un instant. Ensuite, le Boucher se referma sur lui-même, enleva sa main de l'épaule de son semblable comme si cette dernière avait été composée d'acide, puis parti sans un mot de plus.
Alasker l'observa s'éloigner en secouant la tête.
"-Vous lui avez fait perdre tout humour.
-Non. Je l'ai simplement débarrassé du cynisme qui dévorait son cœur."
Le géant de fer tourna de nouveau son attention vers La Sainte. Sans grande surprise, cette dernière lui faisait toujours dos, occupée qu'elle était à allumer deux pitoyables restants de bougies.
"-C'est pour éloigner les moustiques?
-Non. C'est pour le pauvre bougre que tu as battu à mort en arrivant ici...
-Je l'ai décapité, en fait." Précisa Alasker.
Exactement comme pour Tarcus, la précision macabre ne sembla pas surprendre, choquer ou même atteindre son interlocutrice, qui se contenta de poursuivre :
"-...Et c'est aussi pour toi."
Cette fois, l'ancien mercenaire ne put se retenir de pouffer.
"-Oh, je vois. C'est parce que je me suis perdu dans les ténèbres et que vous me plaignez parce que je ne connais pas la joie d'aider mon prochain, tendre l'autre joue et...Heu...Qu'est-ce qu'ils aiment faire dans les églises, déjà?"
La Sainte haussa les épaules en répondant :
"-Prier?
-Mais non ! Enculer des enfants de choeur ! Ah, et dire que j'allais oublier ça !"
Le chétif corps humain de son interlocutrice fut secoué d'un petit rire. Alasker sourit en l'entendant.
"-Prévisible, je suppose. Tu blasphèmes pour me jauger. Pour voir si je suis, oui ou non, une fanatique prompte à condamner au bûcher l'hérétique, la sorcière...
-Et le roux !
-...Et le roux. Comme au moyen-âge, parce que, pour une raison inconnue, une grande partie des sceptiques, comme toi, associent ouvertement toute forme de religion au moyen-âge et à ses débordements."
Alasker écarta les bras et hocha la tête, vaincu.
"-C'est plutôt bien résumé. Dois-je en déduire que je n'aurais pas à massacrer une horde de fanatiques en furie à mon départ?
-J'en ai bien peur. La perspective de voir Tarcus rejoindre une cause moralement acceptable bien que motivée par le mysticisme te parais donc si invraisemblable?
Le souvenir d'une marée de corps nus, démembrés, flottant mollement au milieu d'un lac à l'eau rougie, passa furtivement derrière les yeux du géant.
Il grimaça, gêné, en répondant :
"-Ma...heu...Soeur? Si je puis me permettre. Vous n'avez pas vu ce que j'ai vu. Vous ne l'avez pas vu faire ce qu'il a fait."
La Sainte hocha la tête puis, enfin, se décida à se tourner vers lui et enlever sa capuche pour dévoiler son visage. Ainsi, Alasker put découvrir que la femme face à lui n'était guère plus qu'une enfant, noire de peau comme de cheveux, qu'elle avait coupé très court, aux joues creuses et aux pommettes tellement hautes qu'elles semblaient refaites. Ses yeux marrons renvoyaient un regard plus espiègle et nettement moins sacré que ce à quoi Alasker s'était attendu. Sans parler de son sourire, trop franc, trop enfantin, trop beau, presque, pour servir les mensonges d'une religion quelconque.
"-Encore un instant et tu te mettras à baver." Ironisa la Sainte enfant.
L'ancien mercenaire cligna des yeux comme pour chasser une image rémanente.
"-C'est ça, la Sainte? Je m'attendais à une vieille bigote entendant des voix, prostrée tout au fond d'une tente puant la pisse !
-Tarcus m'a dit la même chose à son arrivée."
Alasker pencha la tête sur le coté.
"-Vraiment?
-Oui. Mais d'une manière plus...Vindicative."
Il pesta.
"-Oh, me dites pas qu'il s'est mit à la pédophilie ! Il pourrait être votre grand-père...Non. Votre arrière-grand-père !
-Non. Notre première rencontre s'est faite dans la brutalité, parce qu'il ne pouvait en être autrement. Durant un instant, il a voulu..."
Un mélange de colère et de honte s'empara du tueur.
"-Il a voulu violer une gamine dans le désert ! Et maintenant ça fait le chevalier blanc, sans peur et sans reproche ! Y'a vraiment aucune limite à sa v...
-Il s'est ravisé et m'a demandé pardon. C'est comme ça qu'il a rejoint les miens. Il ne m'a fait aucun mal, au final."
Alasker soupira.
"-Si vous le dites. Sainte. Comment une adolescente peut devenir une sainte capable de pacifier Le Boucher?
-Ce n'est pas important. Et la réponse, en vérité, ne t'intéresse pas le moins du monde."
Le nettoyeur du Talon haussa les épaules.
"-C'est vrai.
-Tu viens le chercher, n'est-ce pas? Tu souhaites l'emmener avec toi?
-Mademoiselle lirait-elle dans les pensées?
-Il ne viendra pas.
-Ca dépend de ce que je lui propose. Cette vie ne convient pas à un être comme lui.
-Personne ne l'a jamais retenu. C'est par choix qu'il est resté. Cette vie lui convient."
Alasker plongea son regard dans celui de La Sainte. Durant plusieurs longues secondes, la femme-enfant et le monstre de métal se jaugèrent, sans un mot.
Et puis il éclata de rire.
"-C'est tragique."
Ce qui passait pour de l'agacement chez cette gamine perça son regard, furtivement.
"-Quoi donc?
-T'y crois vraiment, à tes conneries, hein? T'es persuadée que Le Boucher n'existe plus, que tu l'as changé pour Sire Chevalier Blanc.
-Cela fait cinq ans qu'il vit ici. Jamais il n'...
-Cinq ans ! L'odeur des tripes ouvertes et du sang doit vraiment lui manquer ! Il en rêve la nuit, j'imagine?"
Nouveau silence. La Sainte se contenta de le regarder en souriant, sans ajouter quoique ce soit. A un tel point qu'Alasker s'en sentit mal à l'aise.
"-Ca y est, ta parade de grand méchant soldat sanguinaire est finie?
-Ca, c'est vexant.
-Je peux voir ta souffrance dans tes yeux. Et tu t'évertues tant à me dissimuler le tremblement de tes mains que toute la partie gauche de ton visage vibre sans arrêt. Tu vas me faire croire que cette vie te plait, que la paix ne te fais pas envie? Que tu ne regrettes rien et que certains horribles souvenirs ne te font pas cauchemarder dès que tu fermes ces yeux noirs?"
L'écho du souvenir d'un rire nasillard raisonna dans le crâne du géant.
Il serra les poings.
"-Ces tics sont là parce que je ne fais pas ce qui me plait en te parlant, petite fille. Pries pour que je ne cesse jamais de les avoir en ta présence, plutôt qu'essayer de leur trouver une signification humaine acceptable. Je ne suis pas humain.
-C'est triste.
-Seulement d'un point de vue humain. Mon corps comme mon esprit aiment et désirent cette vie. On m'a façonné pour ça."
Quelque chose d'aussi répugnant et honteux que des larmes de compassions apparurent aux coins des grands yeux marron.
"-Et tu ne rêves de rien d'autre, jamais?
-En vérité, je ne rêve. Tout simplement. Pas."
La gamine le regardait avec une telle pitié qu'Alasker ressentit durant quelques dangereuses secondes le besoin urgent de clore ses foutus yeux pour de bon. Il se visualisa la découper dans le sens de la longueur, à main nue, et se détesta pour cela.
"-C'est pour cela que tes façonneurs t'ont trouvés parfait."
Le sourire qu'Alasker afficha en réponse n'avait strictement rien de chaleureux.
"-Pas parfait. Réussi.
-Réussi."Répéta la Sainte avec dégoût."Tellement déshumanisant.
-Précisément. Je ne suis plus humain, petite prêtresse. Ils ont fait de moi ce qu'ils voulaient : le prédateur ultime du genre humain. Je suis donc réussi."
Le soupir de la Sainte le fit grincer des dents.
"-Tu es si aveugle."
Tout en prononçant ses mots, elle avait remit sa capuche pour se tourner de nouveau vers l'autel.
Le silence revint. Alasker écarta les bras face à cette apparente fin de dialogue.
"-Quoi? C'est tout?"
Pas de réponse.
"-Pas d'autres récriminations? Tu me montres ton Sacro-Saint dos et c'est fini?"
La Sainte l'ignora et s'agenouilla de nouveau devant l'autel. Face à cette absence de réaction totale, le géant fut tenté de dégainer son arme et de vider un demi-chargeur sur celle qui l'insultait ainsi. Il parvint à se reprendre juste avant de presser la détente.
"-Du coup, notre entretien est terminé? J'peux y aller?
-Bien sûr. Maintenant, je sais ce que tu es.
-Ah, t'as encore une langue." Alasker se passa sa propre langue sur les lèvres avant d'enchainer. "Et donc, je suis quoi?
-Une épreuve." Répondit la gamine, tout simplement, en recommençant à psalmodier en latin.
D'agacement, le géant se gratta l'arrière du crâne au point d'arracher la peau autour d'une de ses vis  et soupira.
"-Une épreuve? Et tu l'as réussie, selon toi?
-Non. Pas pour moi. Une épreuve pour lui. Allez, va. Maintenant."




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Alasker Crudelis
Alasker Crudelis
Le nettoyeur
Dim 10 Nov - 14:15

A la lueur d'une bougie posée sur une table en bois, au milieu de l'énorme tente qu'il avait lui-même dressé à la bordure sud-est du village de pèlerin, Tarcus lisait. C'était une lecture connue. Une lecture aisée. Chacun des mots inscrits sur les pages usées de cet impressionnant livre aux reliures de cuirs étaient bien connus du chevalier de La Sainte. Le chapitre que ses yeux parcouraient en ce moment même, il pouvait le réciter de mémoire. Comme les quatre-vingt quatre autres, d'ailleurs. En réalité, Tarcus n'avait même plus besoin du support véritable, du livre lui-même, pour relire ses pages. Sa mémoire parfaite pouvait lui fournir, dans l'ordre, la photographie de chacune d'elles, sans fautes, à la virgule près. Pour réaliser cet exploit, il n'avait qu'à fermer les yeux et y penser.
Mais le repenti s'y refusait. Relire chaque soir, chaque nuit, ce livre dont l'auteur n'était autre que lui-même, cela faisait partie de sa pénitence. C'était une forme de flagellation littéraire.
Dès qu'un doute l'assaillait, dès que la violence refaisait surface, l'ancien Boucher plongeait ses yeux dans ces pages, remplies de ses mémoires, de ses anciens péchés.  Immobile, le livre sur les genoux ou posé sur la table, il restait concentré sur la lecture d'un demi-millier de massacres injustes et de guerres insensées. Chaque horrible détail y était minutieusement décrit. La sueur mélangée à la pisse, à la cendre et au sang. Les hurlements de ceux qui se savent en pleine mort. Et de ceux qui préféreraient que ce soit le cas. Les coups de baïonnettes répétés. Les crosses tordues écrasants chairs, tendons et os. Le tonnerre de l'artillerie. Le sifflement des balles. La brutalité d'une mort par un tir de sniper. La répugnante suprématie de son corps et de ses sens sur ses adversaires. La chaleur des flammes dévorant celles et ceux ayant osés se dresser contre l'engin de mort qu'il serait toujours...
Le non-sens de cette existence.
Lors de ses premières relectures, Tarcus s'était esclaffé face à tel ou tel souvenirs, pris corps et âmes par l'amusement malsain, cynique, fou, l'ayant mené sur cette voie. Et puis, il avait commencé à avoir honte. La nausée était apparue au sixième mois. Au neuvième, l'ancien Boucher vomissait chaque nuit au souvenir de ses propres méfaits. Au onzième, Tarcus n'éprouvait plus que mépris et dégoût pour son ancienne vie.
C'était un exercice terrible. Long. Cruel. Mais mérité.
Et Le Protecteur de Persefonne s'y livrait toujours, trois ans plus tard. Sans regret.

"-Laisse-moi deviner, c'est la bible?" Grinça une voix trop grave pour être humaine, dans son dos.
Tarcus haussa les épaules sans quitter des yeux les lignes écrites.
"-D'une certaine manière, oui."
Alasker entra dans la tente aussi brutalement qu'à l'accoutumée. Pas de demande de permission. Pas de délicatesse. Les dents du Chevalier grincèrent lorsqu'il entendit le pot de fleurs qu'une veuve lui avait offert, deux saisons plus tôt, disparaître sous le pied botté du grand tueur.
"-C'est la caverne d'Ali-Baba ici." Apprécia l'imbécile, en balayant de son regard noir l'intérieur du refuge de son frère.
Tout autour d'eux, un millier de souvenirs, de présents, de trouvailles et de trésors à la valeur uniquement sentimentale s'empilaient les uns sur les autres et prenaient la poussière. Le sol de la tente était un énorme tapis cousu par trois orphelins que Tarcus avait jadis tirés d'un incendie. L'étrange lustre fait de plastique fondu pendant au-dessus d'eux avait été conçu par un aveugle que Le Chevalier avait sauvé de la maladie en le portant sur trente kilomètres, à travers le désert, pour le déposer aux pieds de La Sainte et de ses sœurs. Ce simple galet, parfaitement rond, Tarcus l'avait déniché et emmené avec lui sur un coup de tête, après un voyage particulièrement long dans un oasis infesté de constructions omniacs folles.
"-Ne touche à rien, s'il-te-plait." Demanda-t-il simplement, en tournant la six cent quatrième page.
Alasker pouffa en tapotant sur la chaine soutenant le poids du lustre.
"-Y'a rien qui vaut le coup que j'y touche, de toute façon."
Le repenti ne prit pas la peine de souligner l'affront que son frère faisait à sa dignité, peu sûr que ce dernier puisse ne serait-ce que comprendre l'importance de tels souvenirs. Au lieu de cela, il se contenta de souligner une évidence.
"-Tu n'as pas accepté son aide."
Ce n'était pas une question. Et Alasker ne lui fit pas l'affront d'y répondre comme si ça avait été le cas. Calmement, le géant du Talon alla s'asseoir sur le seul siège "libre" de la pièce (c'est à dire un matelas couvert de poussière) tandis que son semblable sans armure le dardait d'un regard peu amène en tapotant sur la couverture du livre posé sur ses genoux.
Il y eut un court silence. Gênant. Malaisant. Et puis Tarcus le brisa.
"-Elle n'éveille aucune sympathie en toi?"
Alasker secoua la tête.
"-Le plus surprenant, c'est qu'elle en éveille en toi. Qu'est-ce qui t'es arrivé, Boucher?
-Cesse de m'appeler comme ça.
-C'est ce que tu es. Ce que tu as été. Et ce que tu seras toujours. Quoique tu fasses pour le cacher."
Le chevalier géant referma l'énorme livre posé sur ses genoux puis recentra son regard sur son semblable. Ses yeux si clairs rencontrèrent les ténèbres dont étaient conçus ceux de son frère. Il y avait de la pitié dans le regard du tueur repenti. Et de la souffrance.
"-Pauvre Alasker. Tellement persuadé d'avoir toujours raison. Tellement persuadé d'avoir prit LE bon chemin, tout le long de sa vie."
Les crocs du concerné se découvrirent.
"-Mais j'ai pris le bon chemin. Regarde, en le suivant, j'ai même retrouvé mon bien aimé frère perdu.
-Donc, dans ton esprit simplet de bête sanguinaire, je suis perdu par une cause trop juste pour moi et tu viens me sauver en me rappelant les bienfaits du meurtre gratuit, c'est ça?"
Le sourire d'Alasker s'agrandit un peu plus et un fin filet de bave s'écoula le long de son menton.
"-Ton esprit a été modifié comme le mien. Et, en tant qu'humain, t'étais déjà pire que moi maintenant. Y'a que les bains de sang pour nous satisfaire pleinement, maintenant. C'est ça, notre vie. Nous sommes littéralement faits pour cela.
-C'est une existence qu'on m'a imposé."
Un rire moqueur secoua l'énorme carcasse du nettoyeur.
"-Oh, c'est ça. Tu fais ta crise d'ado. Tu te rebelles contre ceux qui t'ont fait renaître ainsi. C'est inutile, tu sais. Ils sont tous morts. J'ai tué la plupart. Et les autres ont sans doute crevés de vieillesse.
-Evidemment. Et dire qu'ils t'ont considérés comme..."le plus fiable".
-Y'a des limites à c'qu'un soldat, même fiable, peut accepter."
A ces mots, Tarcus eut comme...Un genre de sursaut. Il esquissa un étrange sourire, reposa le livre sur la table et se leva pour se diriger vers une malle faite de bois, sous le regard interrogateur de son "frère".
"-Mon frère, accepterais-tu que je te montre ce que j'ai découvert?
-A quel sujet?
-Le nôtre.
-Oh, tu sais, je suis pas sûr de mes sentiments et..."
Tarcus ouvrit la malle en ignorant les gloussements de l'autre géant, derrière-lui. Il en extirpa, après quelques minutes de fouille, un grand classeur, à la couverture rouge et usée.
"-C'est ton album de photos de classe?
-Pas exactement. Sais-tu pourquoi tu as été pris pour le programme?
-Parce que j'étais volontaire et incroyablement bon pour tuer mon prochain?"
Le surhomme sans armure fusilla son égal d'un regard hautain tout en commençant à feuilleter l'ouvrage. Avec une dextérité ne pouvant venir que de l'habitude, il parvint au bout de quelques secondes à trouver la page qui l'intéressait et à l'amener au niveau du nez d'Alasker.
"-Pas uniquement pour ça. Tu arrives à lire ce qu'il y a d'écrit?
-Flemme, la dernière fois que j'ai lu un rapport en cette langue, Overwatch tenait toujours debout."
Avec un soupir, Tarcus reprit le dossier et commença :
"-C'est ton dossier "d'admission". Celui qui t'a permit d'intégrer le projet. Comme pour tout les autres, il y est noté que tu es dangereux. Cruel. Rapide. Précis. Avec de très grosses tendances sociopathes.
-C'est tout moi, pour l'instant.
-Oui. Mais on parle surtout de ta tendance presque maladive à suivre les ordres sans discuter. A t'incliner et laisser aux autres la responsabilité de décider.
-Ouai. Un soldat de rang quoi. J'm'en suis jamais caché.
-C'est ça qui t'a rendu si parfait. Si "réussi" pour eux. A l'inverse de moi. Ou de Sullyvan. Ils ont trouvés chez toi la personnalité influençable idéal. Un esprit faible mais prometteur dans un corps fort. La parfaite marionnette. Le facteur déterminant de ton entrée dans le programme, c'est ça. Pas le fait que tu ais été un dangereux tueur. Tout les soldats des FS le sont. C'était ton esprit trop malléable. Trop faible."
Tarcus scruta quelques instants son frère, à la recherche d'un signe de faiblesse. D'énervement. De tristesse. Ou au moins de déception.
Mais Alasker n'avait même pas l'air concerné.
"-Et donc?
-C'est tout ce que ça te fais?
-Qu'est-ce que tu voulais que ça me foute? Y'a que toi pour t'arrêter sur de si petits détails. J'm'en cogne, de mon passé humain. Je ne m'en souviens quasiment plus."
Tarcus camoufla un éclat de rire en quinte de toux.
"-J'allais y venir. Quel souvenir tu as de ta vraie vie?
-Ma vraie vie?
-Ta vie dans le civil. Avant qu'on ne te prive de ton humanité."
Les épaulières de l'armure noire se haussèrent dans un concert de grincement.
"-Quasiment rien. Je me souviens de...mon inscription à l'armée. De l'ennuie qui m'a fait prendre cette décision.
-Et les proches? Tu te souviens de tes proches?
-Nan. Je crois pas en avoir eu beaucoup, de toutes façons."
Le repenti soupira. Alasker se renfrogna en constatant l'hésitation prenant peu à peu place dans les traits trop nobles de son frère.
"-Bon, quoi?
-Ton nom? Tu te souviens de ton nom?"
Sa bouche s'entrouvrit... Et se referma. Crudelis. C'était ce qu'il avait voulu répondre. Crudelis. Mais ce n'était pas son nom. Juste le nom du projet l'ayant changé en dieu de la guerre. Mais il y avait eu un nom, avant ça. Alasker fronça les sourcils en prenant conscience que son propre nom lui était inconnu.
"-Bah...Non."
Un sourire désolé se ficha sur le visage de Tarcus alors que ce dernier relevait la tête pour fixer de nouveau son frère, abandonnant des yeux, pendant quelques instants, son manuscrit.
"-Le visage de tes parents. Le prénom de ta mère. De ton père?"
Alasker secoua la tête.
"-Où tu veux en venir, Boucher? Cesse de tourner autour du pot. J'ai été honnête avec toi, j'en attends autant de ta part."
Ledit Boucher opina gravement du chef, passa rapidement les pages du dossier jusqu'à une petite bandelette bleue lui servant apparemment de marque-page. Avec précaution, Tarcus plongea la main à l'intérieur d'une fiche plastique pour extirper de cette dernière quatre photos et les tendre à son interlocuteur. Alasker dû retirer ses gantelets pour pouvoir s'en emparer sans les plier.
Les deux premières photos étaient celles de corps emballés dans des sacs mortuaires. La fermeture éclair desdits sacs s'arrêtait juste en-dessous du menton des cadavres, pour l'identification sans doute. C'était les visages d'un homme et d'une femme d'âge mûr, allongés devant les ruines calcinés d'une maison dans les bois. Les autres photos offraient à peu près le même spectacle, dans des lieux différents, avec plus ou moins de corps. Mais elles n'attirèrent pas le regard du nettoyeur de la même manière que les premières. La conclusion vint d'elle-même. Il posa le gros index de sa main gauche sur la première photo :
"-Le barbu, avec une mâchoire de géant. C'est mon père. Et elle...
-Ta mère." Compléta Tarcus en hochant la tête.
"-J'aimerais dire que ça me touche beaucoup. Mais c'est pas le cas. Comment sont-ils morts?"
Le repenti répondit en l'évitant du regard :
"-On a retrouvé leurs corps par un matin d'hiver. Leur maison aurait apparemment servie de refuges à une bande de terroristes pro-omniacs. Ils les auraient descendus après..."
Alasker le fit taire en lui jetant les photos au visage.
"-Je connais les conneries que nos gars racontaient aux journalistes pour faire le ménage. Donne-moi la véritable version. Qui les a tués?"
Encore ce doute, dans le regard de son frère de douleur. Et puis le silence. Le géant du Talon ferma les yeux et secoua la tête.
"-Laisse tomber. Je crois deviner."
Tarcus se baissa pour ramasser délicatement l'une des photos et la ranger dans la pochette plastique.
"-Est-ce qu'ils m'ont reconnus?
-Non. D'après les rapports, tu as gardé ton casque tout le long, alors...
-Ils n'ont vus qu'un gros monstre de fer débarquer chez eux pour les tuer avec un flingue plus grand qu'eux.
-C'est ça."
Court silence. Alasker se massa les tempes en tentant d'identifier, non sans difficulté, le malaise qu'il sentait grandir en lui. Il avait assassiné ses parents, certes. Pourtant, encore une fois, ce qui le mettait mal à l'aise, c'était justement son absence d'indignation, de colère, de réaction explosive, face au plus abjecte des constats.
"-L'ordre venait de qui?
-Un colonel doutant de ta viabilité. Quand il a su que tu ne les avais même pas reconnus, ses doutes se sont envolés. Tu l'as coupé en deux à ta sortie, si ça peut te réconforter."
Les lèvres d'Alasker s'écartèrent dans un sourire mauvais.
"-Peut-être qu'il aurait dû continuer à douter, alors."
Tarcus ne répondit rien, se contentant d'hocher la tête et refermer le dossier, non sans avoir, au préalable, replacé chacune des photos manquantes avec une extrême délicatesse. Cet excès de douceur de la part du Boucher attisa les doutes de son semblable.
"-Et les autres macchabées?
Alasker sentit son frère se hérisser face à cette question.
"-Ca n'a pas d'importance."
Mais Le Nettoyeur n'était pas du même avis.
"-Ca en a pour moi. Qui était-ce? Ils vous ont forcés à faire la même chose, hein?  C'est comme ça qu'ils ont su que toi et Sul', vous n'étiez pas "viables". "
Tarcus ne répondit pas tout de suite. D'abord, il garda le silence, durant d'interminable seconde, en le fixant d'un demi-sourire. Et puis...
"-Non, Al'. Ils ont su bien plus tôt que lui comme moi n'étions pas viables. Ils m'avaient vendus à un labo. Et Sul' était déjà chez les ruskofs de Volskaya, à servir d'armes biologiques incontrôlables. Y'avait que toi qu'ils employaient pour faire le sale boulot."
Le nettoyeur ravala la bile acide qui venait de remonter le long de sa gorge.
"-J'ai tué les parents de Sullyvan. Et les tiens.
Tarcus hocha une dernière fois la tête.
"-Sa sœur, aussi. Ma nièce. Et mes deux cousins."
A cet instant, le chevalier cru véritablement qu'Alasker allait le tuer. Le regard dont il écopa ne trahissait que cela : un désir de mort. De destruction. La seule échappatoire que Tarcus avait lui-même connu, des années auparavant. Avant ce village. Avant Persefonne. Avant son livre. Le Géant De Fer n'avait pas eu tout cela. Au contraire. Au lieu de s'extirper coûte que coûte du royaume de la mort, Le Nettoyeur s'y était baigné sans retenue durant toutes ces longues années. Sans arrêt. Sans réflexion. Sans regret. A sa place, Tarcus le savait, il aurait déchainé cette colère, née de sa propre honte, sur celui ayant osé dévoiler une aussi horrible vérité. Une vengeance stupide mais inévitable, sans véritable logique, n'apportant qu'un réconfort mineur, tiré d'un déchainement de violence aussi court qu'intense.
Un réconfort dont Alasker se priva, en quittant simplement la tente, d'un pas certes courroucé, mais ô combien calme comparé aux scènes que son frère s'était imaginé à cet instant.
Tarcus l'observa disparaître vers l'extérieur, prendre une décision aussi sage, malgré les injections de drogues de combats, malgré les années de conditionnement, de traumatismes, de combats et d'exécutions. Et éprouva, pour la première fois, du respect pour son frère.




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Dim 10 Nov - 15:05

Dehors, la nuit était tombée. Tout comme lui, d'ailleurs, même si la lune offrait un bien meilleur spectacle que son énorme carcasse ainsi prostrée, à genoux dans le sable d'un village qui le débectait et qu'il ne comprenait absolument pas. Au loin, sur le sommet d'une dune, des enfants aux corps anormalement maigres jouaient à un jeu connu, brutal. Le roi de la colline. Ils se battaient, se poussaient, frappaient, les uns les autres, pour pouvoir s'emparer de ce petit tas de sable sans importance. En devenir le roi. Alasker connaissait bien les règles de ce jeu. Trop bien. Sans l'ombre d'un doute, le gosse qu'il avait un jour été s'était prétendu, un nombre incalculable de fois, roi de sa propre colline. Même la brume obscurcissant ses souvenirs ne parvenaient pas à dissimuler un fait aussi évident. Parce que, après tout, ce jeu, il avait continué à y jouer, tout le long de sa vie.
La nature de la colline avait changé. Les adversaires aussi. Mais au final, qu'était-ce donc que la guerre, si ce n'est un roi de la colline aux proportions grotesques?
L'ancien mercenaire se surprit à sourire à cette pensée. Quelle analyse grotesque. La philosophie...Ou plutôt le sophisme, ça n'avait jamais été quelque chose que son pauvre esprit avait su maitriser. Trop abstrait. Pas assez matériel. Ca ne découpait ni ne tirait pas. Alors à quoi bon, après tout?
"-Même elle ne le savait pas, tu sais." Fit la voix du repenti, dans son dos. Son corps réagit en bouillonnant de nouveau. La pression à l'intérieur de son crâne s'accentua. Et il manqua d'hurler de rage en comprenant à quoi...Ou plutôt à qui, il faisait allusion. "J'ai dû fouiller dans des dossiers auxquels même elle n'avait pas accès pour savoir ça.
-Je l'ai tuée, elle aussi." Gronda le géant agenouillé, qui se délecta du silence gêné ne manquant pas de suivre cette révélation. "Il semblerait que les seules personnes que je ne tue pas, dans mon entourage, soient ceux qui mériteraient de mourir.
-Écoute...
-Ça ne change rien, tu sais?"
Le géant sentit le regard de son frère de souffrance lui transpercer le dos. Un regard qu'il se faisait un devoir de ne pas relever. D'encaisser. Pour continuer, aussi calmement que possible.
"-Tu crois que je vais me sentir coupable de ça? D'avoir massacré la famille d'un boucher? Que ces révélations vont "m'ouvrir les yeux" et faire de moi un homme nouveau, un repenti, cul-béni, un muselé? Comme toi?"
Le ton de sa voix commença à monter. Son intensité attira l'attention des gosses jouant sur la colline.
"-La haine, c'est ce qui définit les hommes comme nous, Tarcus. Tu l'as oublié mais pas moi. Tu crois que tes paroles empoisonnées vont me faire changer?
-Non, mon frère." Tenta l'ancien boucher d'une voix se voulant apaisante.
"-Tu crois que je suis plus responsable que toi pour ta famille? Tu as tué ton frère toi-même, des années auparavant. A main nue. Il a fallut plusieurs tout petits sacs mortuaires pour enlever son cadavre. Tu l'as réduis en bouillie. Et manière consciente. Avant les modifications. Avant les drogues."
Le chevalier s'avança d'un pas tandis qu'il se retournait pour lui faire face.
"-Je n'ai jamais dis que je valais mieux que toi, Alasker."
Alasker gloussa en répondant d'un ton amer.
"-Tu n'as pas besoin de le dire. Ca transpire dans toutes tes actions depuis que je suis arrivé. Cette espèce de fausse-supériorité. Cet air hautain, le même que les gradés prenaient quand on se présentait à eux, couverts de boues, puant le sang et la mort, à l'époque. Tu te souviens de ça?
-Bien sûr.
-Tu n'as pas oublié qui de nous deux tuait le plus? Avec quelle acharnement tu te nourrissais de la douleur des autres, au point d'en dégoûter les pires d'entre-nous, au point de devenir le boucher que certaines histoires du pays continuent de décrire comme étant une créature cauchemardesque, inhumaine, un croque-mitaine des tranchées, capable de faire trembler chair comme métal?"
Tarcus ferma les yeux et leva ses mains dans un signe d'excuse sincère.
"-Crois-moi, frère, tu n'as pas besoin de me rappeler mes péchés."
Alasker s'avança encore, d'une façon ne pouvant laisser aucun soupçon quant à son objectif. D'une main, il repoussa le repenti, qui se contenta de reculer doucement, sans esquisser de gestes brusques.
"-Alors pourquoi, bordel?!" Explosa le Géant du Talon, sans cesser d'avancer.
Un homme armé débarqua de derrière les dunes, face à la tente, suivi par deux femmes aux faciès déformés par l'inquiétude protégeant, de leurs maigres corps, quelques enfants curieux.
"-Eloignez-vous." Gronda Alasker.
Tarcus enchaina d'une voix douce, surtout comparée à l'éboulement rocheux qu'évoquait la précédente intervention :
"-Faites ce qu'il vous dit. Je vous en prie."
Les femmes et les enfants reculèrent. Seul l'homme armé demeura. Ses petits yeux noirs ne cessant de s'agiter sous son front épais, passant d'un géant à l'autre.
"-Paolo, s'il te plait." Insista le Chevalier, sans parvenir à masquer l'appréhension soudaine qu'il ressentait.
Ledit Paolo s'humidifia les lèvres avant de répondre :
"-Vous avez toujours été bons avec nous, Tarcus."
Alasker, qui s'était immobilisé pendant quelques dangereuses secondes le temps de cette courte entrevue, se tourna vers le petit humain et siffla :
"-Alors pars. Sinon, je vais te tuer. Et il va vouloir te venger, alors je vais devoir le tuer aussi. Et ensuite, je vais massacrer toute cette parodie de village, parce qu'il m'aura fait raté ma putain de mission."
Court silence. Alasker grimaça d'agacement, sans réussir à réprimer la vibration de sa paupière droite. Puis Paolo se retira. Tarcus laissa échapper un soupir de soulagement, que l'autre géant coupa en le poussant de nouveau.
"-Réponds, pourquoi?
-Je...
-Pourquoi, putain? J'ai tué ta famille. Craches-moi au visage, sors une hache ou un de ces foutus couperets que tu aimais tant et découpes-moi avec, mais ne fais pas ça. Tu n'as pas le droit. Tu es comme moi. Tu as été pire que moi. Que nous tous."
Tarcus acquiesça.
"-Je ne t'en veux pas, frère. Je suis désolé si le contraire semble avoir...
-Je ne veux pas de tes excuses. Je ne veux pas de ta pitié. Je vaux mieux que ça !" Hurla le Géant de fer.
Tarcus bondit en arrière, évitant ainsi de recevoir le poing de son frère en plein cou. L'envie de revenir dans sa tente pour s'armer et se défendre contre ce monstrueux agresseur lui traversa l'esprit, mais il la combattit sans difficulté. A la place, le chevalier s'immobilisa et pencha la tête en arrière, offrant ainsi sa gorge sans défense à son frère. Qui se stoppa a son tour, retenant le coup qu'il s'apprêtait à porter de nouveau.
"-Qu'est-ce que tu fais?" Grinça la bête du Talon, entre ses dents serrées.
"-Je te fais confiance."
Alasker gronda. Son poing trembla. Son frère perçut le craquement des parties métalliques du gantelet, incapables de supporter la pression exercée par son propre possesseur.
Une longue minute passa, durant laquelle deux géants demeurèrent parfaitement immobile, figés, telles des statues. Celles de deux demi-dieux frères, que tout opposait. L'un, resplendissant mais humble, vêtu simplement, souhaitant la paix, la réconciliation avec l'autre : le terrifiant, encastré dans l'acier froid d'une armure faite pour la guerre, rendu fou par une haine sans borne envers toute chose, capable même de porter un coup à celui qui avait un jour été son frère.
"-Tu es faible, Tarcus." Cracha finalement le belliqueux.
"-J'embrasse ce genre de faiblesse avec joie, mon frère."  Répondit le resplendissant, un sourire triste sur le visage.
Alasker pouffa sans même tenter de cacher son mépris grandissant.
"-Alors, cette gamine t'a vraiment endoctriné? Tu crois en dieu, maintenant? Malgré tout ce qu'on a vu. Malgré tout ce que tu as fais?"
Tarcus secoua la tête.
"-Ce n'est pas auprès d'une créature divine, psychotique et narcissique, que je cherche la rédemption. Mais auprès des hommes."
Les gloussements du nettoyeur ne semblèrent pas l'atteindre plus que ça, même si Alasker se persuada du contraire :
"-Abi me l'avait dit : Un peu trop grandiloquent et mélancolique par moment. C'est peu d'le dire. A chaque fois que tu l'ouvres, j'ai l'impression d'entendre la lecture d'un épitaphe particulièrement long et pénible."
Tarcus sourit sans rien ajouter.
"-Et donc, t'as rien trouvé de mieux, pour représenter ces fameux hommes, que ces quatre ou cinq blaireaux, culs-bénis, arriérés, paumés et ridiculement agressifs ?"
Le repenti secoua la tête d'un air goguenard, comme si il avait entendu une mauvaise blague.
"-A ton avis, quel est le passé de cet homme, Paolo, celui qui est intervenu tout à l'heure?"
Haussement d'épaules de la part de l'interrogé :
"-Le résultat de l'union incestueux de sa mère, qui deviendra plus tard sa femme, avec son grand-père?
-C'est un guérillero. Un bon tireur. Reconverti dans le mercenariat et le banditisme après qu'on l'ait viré de l'armée et condamné pour acte de barbarie. Sa femme, des anciens "amis" à lui l'ont ouvertes de bas en haut, après une simple mésentente dans leurs bandes."
L'histoire ne sembla pas spécialement troubler l'autre géant.
"-Ca n'invalide pas ma version.
-Effectivement.
-Du coup, encore une pauvre âme violente, égarée dans le péché, qui est venue se terrer chez mère Theresa?"
Cette fois, le sourire de Tarcus sembla plus...Factice.
"-Ça ne me plait pas plus que toi, d'utiliser la religion pour rediriger ces gens dans la bonne direction. Mais la Sainte souhaite que ce soit ainsi. Ils se confessent à elle plus aisément lorsqu'elle endosse le rôle de messagère divine."
Alasker s'esclaffa en entrechoquant ses deux grosses mains.
"-Bah voyons, tu m'étonnes ! Une vraie petite chef de secte, régnant innocemment sur un village de pouilleux, de rejetés et d'anciens tueurs. Avec un seigneur de la guerre repenti en guise de meilleur exemple et de garde du corps!"
Ledit garde du corps sourit tristement, une nouvelle fois.
"-C'est une façon assez horrible de voir les choses.
-C'est la vérité. T'es son trophée fiston. Combien elle avait de disciple, avant que t’arrive?
-Disons qu'il...N'y en avait plus beaucoup, après mon arrivée."
Les gloussements du Nettoyeur reprirent.
"-Imagines-toi cinq minutes à la place de tout ces pauvres débiles. Elle a reconverti un géant, pourtant mille fois pécheur, au point de l'avoir désormais à son service. Un géant. Un truc qui n'est même pas censé exister. De quel droit, eux, pourraient résister à ses saintes paroles? Il ne leur a pas fallut deux minutes pour se mettre à croire qu'elle a un don.
-Elle a un don.
-Oh, pitié..."
Tarcus hocha la tête, l'air parfaitement convaincu. Alasker se détourna un instant, le visage marqué par le dégoût et le mépris que lui inspirait cet aveu-ci.
"-Je suis sérieux. Peut-être pas un don octroyé par dieu, mais elle en a un. Elle écoute, pardonne le pire, l'impardonnable, et donne de nouvelles raisons de vivres à ses ouailles."
Le Géant du Talon ne se rappelait que trop bien de paroles semblables, prononcées en l'honneur d'un homme bien plus mauvais, plus sanguinaire, que cette petite fille perdue.
"-Tous les leaders de sectes ont le même don. Celui de savoir embobiner les gens en se cachant derrière le divin.
-Peut-être. Mais c'est pour la bonne cause."
En guise de réponse, Alasker se pinça l'arête du nez.
"-Le boucher, défendant les bondieuseries d'une gamine proclamée Sainte, trop naïve pour se rendre compte qu'elle a créée une secte. "Pour la bonne cause". Tarcus me parle de "la bonne cause".
-Les gens changent.
-Pas tous. Pas la grande majorité. Et surtout pas les tueurs.
-Je ne te savais pas criminologue."
Alasker désigna, de ses deux grandes mains, le village autour d'eux.
"-Faisons une expérience : Privons-les un mois de toi ou de ta Sainte sans les prévenir et sans leur dire quand vous reviendrez. Au bout d'une semaine, un nouveau prophète opportuniste est déjà vénéré. Et, avec un peu de chance, ce sera l'un de vos tueurs reconvertis qui prêchera les bienfaits d'une nouvelle croisade, d'un djihad, ou je ne sais quelle connerie liée à un grand barbu, ciblant celles et ceux responsables de leurs exils."
Le regard de Tarcus se fit sombre.
"-Crois-moi sur parole, Al. Je n'ai aucunement besoin de ce genre d'expériences."
Alasker scruta son frère quelques instants...Puis s'esclaffa.
"-C'est déjà arrivé?!
-Hélas. Après l'un de mes pèlerinages. Un groupe de transfuge, qui nous a harcelé pendant des mois. Persefonne m'interdisait toute riposte, alors ça a duré...Longtemps.
-Mais, au final..." Le pressa Alasker, le sourire aux lèvres.
"-Oui, nous les avons tués. Lorsqu'elle a vu le résultat de leurs folies, sur l'un de nos campements, Persefonne a pleuré et s'est tournée vers moi sans un mot. J'ai alors su ce qu'il m'incombait de faire. Et je l'ai fais. Sans en tirer la moindre satisfaction.
-Combien ils étaient?
-Cent cinquante huit. Femmes et enfants inclus. Un de leurs gosses s'est jeté sur moi avec une ceinture de grenades dégoupillées sur les hanches.
-Oh, j'imagine que leurs jeux préférés consistaient à faire de beaux châteaux de sables alors...Avec deux grandes tours."
Les ricanements du Nettoyeur semblèrent pour la première fois gêner véritablement son frère :
"-Ça n'avait rien de drôle. Certains ont préférés massacrer leurs familles puis se suicider plutôt que se rendre pacifiquement. Tu imagines quel désespoir il faut, pour en arriver là?
-C'est pas du désespoir, c'est du conditionnement. Si c'est bien fait, à la fin, on est même plus vraiment conscient de nos actes." Répondit l'autre géant, une amertume certaine dans la voix.
L'allusion était claire, et Tarcus ne l'approuvait pas.
"-Ça n'a rien à voir, Al'.
-Bien évidemment. J'étais bien moins con qu'eux. Mais c'est pas ce qui m'amène, tu sais? J'discute avec toi que dans un seul but."
L'ambiance gela. La tension revint. Les sourires s'effacèrent. Et le Repenti soupira.
"-Voilà une façon plutôt abrupte de changer de sujet."
Alasker haussa les épaules.
"-On m'emploie pas pour faire dans la subtilité.
-Je ne peux pas venir avec toi, frère. Ma place est ici. Comme tu l'as si bien dis : sans elle, cet endroit pourrira. Sans moi, elle disparaîtra."
Le Nettoyeur hocha la tête, sans sourire, sans mépris ou défi dans le regard. Seulement de la tristesse. De l'appréhension, pour ce qui allait suivre. Ce qui ne manquerait pas de suivre.
"-Mes employeurs te veulent. Vivant ou mort.
-Alors, tu devras me tuer."
Le Nettoyeur s'éloigna de quelque pas pour embrasser du regard le village autour d'eux. Les piles d'armes. De détritus. Sur lesquelles des enfants crasseux et faméliques jouaient, surveillés, parfois, par des adultes aux corps usés par le désert et l'exil. Il parvint sans grand mal à s'imaginer ce qu'il adviendrait de tout cela, une fois la Griffe déployée ici.
Les tentes brûleraient. Les parents seraient rassemblés, alignés, exécutés et jetés dans une fosse commune qu'ils auront été forcés de creuser. Les enfants seraient parqués dans la soute des vaisseaux de transports, désignés d'offices comme "volontaires" pour le lancement d'une nouvelle batterie de test, en vue de créer un nouveau programme de super-soldats.
Et, bien sûr, Tarcus serait prit. Ou, plus probablement, abattu.
"-Tu ne comprends pas. Tu ne sais pas qui ils sont... Les moyens qu'ils ont.
-Je crois que si, au contraire. Il n'y a pas beaucoup de groupuscules assez influents et assez malhonnêtes pour souhaiter s'acheter ta loyauté sans tenter de te museler, d'une manière ou d'une autre. D'autant que tu te présentes aux cotés d'une femme recherchée dans trois pays différents."
Alasker pouffa.
"-Oh, au contraire...Si tu savais le nombre de guignols qui ont essayés de me recruter. Mais qu'importe : ils mourront tous ici si tu ne viens pas, crois-moi.
-Je dois la protéger. Elle les protège d'eux-mêmes. J'ai déjà vu des assassins se transformer en agneaux face à elle. Mais tous ne réagissent pas si bien face à sa rhétorique.
-Tarcus...ne m'oblige pas à t'emmener de force.
-Tu ne le feras pas, je le vois bien. Tu vas être contraint de repartir les mains vides et j'en suis désolé. Mais c'est ainsi.
-C'est ainsi." Répéta le géant de fer avec dégoût. "Sull' disait souvent ça. Pour justifier une décision stupide ou une erreur. J'ai toujours trouvé que c'était faiblard, niveau réplique.
-C'est un aveu de faiblesse. Pas une réplique. Je ne sais pas quoi te dire d'autre.
-Tu es un imbécile, Tarcus."
Et, sans rien ajouter d'autre, Alasker s'éclipsa. Son départ, brutal, ne surprit ni ne blessa pas son frère de douleur. Silencieusement, Tarcus retourna s'asseoir à son bureau, sans prêter attention au fracas provenant de l'extérieur, indice sonore prouvant que le géant de fer avait trouvé quelque chose d'assez d'inanimé et, surtout, d'assez solide pour passer ses nerfs à vif dessus. Quelques minutes passèrent, durant lesquelles le chevalier de La Sainte se contenta d'attendre, écoutant simplement son frère, à jamais pécheur, hurler de rage en frappant dans la roche. Puis, le déluge de rage cessa, remplacé par le souffle rauque d'une bête courroucée mais calmée. Tarcus continua d'attendre. Jusqu'à ce que les bruits de pas de son frère disparaissent dans la nuit. Alors, lorsqu'enfin le silence revint...Il soupira longuement, essuya d'un revers de main l'unique indice d'humanité liquide ayant coulé sur ses joues lors d'innombrables années...Puis le repenti rouvrit son livre pour reprendre, une fois de plus, sa lecture depuis le début.




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Repenti [Solo] [scènes violentes]

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