C'est dans une petite ruelle de Cameden que nos pas s'attardent ce soir. Il faisait déjà nuit, sur la ville de Londres. Si tant est qu'on puisse vraiment parler de nuit, la lumière des néons, des spots et des enseignes déchirant les ombres. Les bruits électriques des voitures magnétiques résonnant comme un bourdon ne s'arrêtaient jamais dans cette ville. On avait vite fait de s'y habituer, et de ne plus entendre que le chant des conversations nocturne. Qui d'un homme louche dans une ruelle, qui d'un omniaque et son amant, qui d'un groupe d'amis ivres. Dans ce capharnahum, devant l'entrée d'un théâtre, une foule se dispersait. Ce théâtre, "Le Prestige" était connu dans tout Londres pour les représentations de son magicien phare Yann Jolly. On venait s'y faire peur, impressionner, transporter, et les centaines de londoniens qui s'amassaient aux portes du petit bâtiment à chaque représentation n'étaient que le témoin du succès.
Ce soir précis, dans la loge, le magicien ruminait. Oh, bien sûr, son spectacle avait été formidable et salué par l'assistance, mais un technicien avait mis le mauvais plan feu. Ces omniaques, on ne pouvait décidément pas leur faire confiance. Terminant de se démaquiller, il sorti une cigarette d'un tiroir et sorti de la loge. Le public était parti depuis quelques temps maintenant, il pouvait enfin prendre sa pause sans gêneurs. Il appuya son dos contre le mur du théâtre. La lumière était faible dans cette ruelle. Dans les ombres, il alluma une flamme au bout de son briquet. Clope au bec, il approcha celui ci du bout, prit quelques bouffées afin de consumer le tabac. Une épaisse fumée blanche s'éleva dans l'air. Il ferma les yeux, laissant ses poumons s'emplir des particules nauséabondes. Il n'avait jamais vraiment aimé ça. Mais cela lui faisait du bien. Même si les cigarettes se faisaient de plus en plus rares, il n'avait pas décidé de décrocher. Après tout, si nécéssaire, il se ferait remplacer les poumouns. Qu'importe. Il songeait dans le silence à son spectacle, au futur, aux divers contrats qu'il avait passé à travers le monde. Le fait était qu'il s'ennuyait. Oh, bien sûr, les frissons du spectacle et du risque étaient toujours là. S'échapper d'une cuve d'eau, ficelé comme un ver en quelques secondes était toujours aussi stimulant, mais bon. A force...
Perdu dans ses pensées, et dans la fumée de cigarette, il ne vit pas l'ombre dans les ténèbres qui s'approchait...